SALSA de PARIS : Discours de la Méthode ...pour danser
L'esprit de DESCARTES plane-t-il sur le monde de la salsa parisienne? Les Règles pour la direction de l'esprit ou le Discours de la méthode vont-ils être les ouvrages de référence pour la pratique de la Salsa...? Danserons-nous un jour une salsa parisienne à la mode cartésienne ... et non plus cubaine ou portoricaine?
Le Courrier International (N° 793), publie un article de presse parût dans ETIQUETA NEGRA ( journal Péruvien de Lima). L'auteur de cet article, l'écrivain portoricain Hector Feliciano, commente son expérience des soirées salsa à Paris.
Extraits :
" Si la salsa est à la mode à Paris, c'est qu'elle est déjà musée, passé, abstraction.
(…)
A Paris, rien dans la salsa n'est laissé au hasard. Un peu d'ordre, que diable! Loin de ces mélanges mulâtres, métis, désordonnés, improvisés, sauvages, du déhanchement délicieux, soudain et spontané, caractéristique de sa contrée d’origine. Dans la Ville lumière, la salsa n’a pas grand chose à voir avec la réalité des bals et des rues des Caraïbes, où l’on s’éclate et l’on se déhanche sans chichis. En France, la salsa s’apprend dans des boîtes et des écoles bien organisées qui aseptisent et rangent dans des catégories la spontanéité des hanches, des pieds, des épaules.
(…)
Dans les salles bondées de Paris, les adeptes de la salsa forment ainsi deux groupes. Sur un mode exclusif et discriminatoire, les uns ne dansent pas avec les autres. Avant même le premier pas, la question fatidique fuse : « tu danses portoricain ou cubain ? ». De fait, le résultat est un mélange d’inventions issues de la très féconde imagination classificatrice française : personne ne danse de cette façon ni à Cuba ni à Porto Rico. La danse pratiquée de nos jours à Cuba est plus improvisée, plus vivante que ces mouvements théoriques qu’effectuent les Français. Et personne ne danse le style portoricain à Porto Rico. Le plus étonnant, c’est que les Français, tout à leur passion du catalogage et de la domestication, n’ont pas laissé de place à l’apprentissage de cette danse populaire et spontanée qui est celle de la grande majorité des habitants des Caraïbes, de Cuba et de Porto Rico jusqu’au Venezuela, en passant par la Colombie. Dans cette région qui l’a vu naître, la salsa se danse comme on navigue : à vue, au jugé.
(…) … derrière la rigoureuse stylisation d’aujourd’hui, les mouvements des mains et les passes élégantes et très conscientes d’elles-mêmes sont des vestiges du rock, dansé dans toutes les fêtes françaises jusqu’au milieu des années 1990. Ces virevoltes et bras tendus si semblables au style à la cubaine proviennent en réalité du bon vieux rock. Et cette influence si répandue aujourd’hui en France sert, d’une certaine manière, à compenser une difficulté physique essentielle : celle de mettre en mouvement les hanches et les pieds, seuls ou en rythme, à la caribéenne. Bref, si votre corps ne bouge pas, remuez les bras avec un peu de raffinement, même si cela doit ôter à la danse toute cette sensualité, ce rythme physique profond qui unit les partenaires.
(…)
Tout à la beauté de la danse et de la musique, nous sommes rares, parmi les adeptes de la salsa, à nous être rendu compte que les nouvelles générations de citadins des Caraïbes avaient trouvé un son plus urbain encore et que la salsa ne leur plaisait plus, ne les faisait plus danser.
(…)
C’est Porto Rico, non plus New York, qui est aujourd’hui l’épicentre du nouveau phénomène musical. La-bas, le reggaeton ( ou regueton en espagnol, mélange de reggae et de hip-hop ) a détrôné la salsa. Le reggaeton se veut ultra-urbain, dur et sensuel, aussi jeune que le fut jadis la salsa, tout aussi visuel qu’elle l’est, mais moins exigeante en ce qui concerne les pas. "
Devons nous en conclure qu'une idée claire et distincte de la façon de danser la salsa peut contredire l'essence même de cette danse? ce sont à vos pieds, sans doute, d'en juger..moins à votre esprit!